vulgate a écrit: Qu'allez-vous donc encore inventer pour essayer de justifier ce suaire dont vous ignorez jusqu'à la réelle provenance.
La provenance du Suaire du Turin est parfaitement connue.Le Suaire est apparu dans l’histoire avant le Moyen Âge. En effet, des textes antiques parlent de lui*. On ne possède pas les originaux de ces textes mais des copies de copies, ce qui ne suffit pas pour démontrer son existence avec certitude. Néanmoins, l'évangile apocryphe des Hébreux, écrit au IIe siècle, dit que le Suaire du Christ a été confié à Pierre. On suppose que Pierre l'a gardé caché, puisque le Deutéronome déclare impur tout objet ayant touché un mort. Plusieurs textes attestent qu'il aurait ensuite été transporté à Édesse avant l'an 57, par un disciple nommé Addaï ou Thaddée.
En 340, Saint Cyrille de Jérusalem mentionne l’existence d'un « linceul, témoin de la Résurrection » *. Pour les quatre premiers siècles du christianisme, les témoignages sont donc ténus mais néanmoins réels.
En 544, le Suaire est retrouvé dans une niche au dessus de la porte ouest de l’église d'Édesse *. Il est alors plié plusieurs fois afin que seul le visage reste visible. Dès lors, il est vénéré en la cathédrale d'Édesse Hagia Sophia comme une icône du Christ. À partir de ce moment, les peintres représentent le Christ avec une mèche de cheveu en forme de 3 sur le front. Ils reproduisent la coulée de sang qui descend sur le front de l'homme du Suaire, qu'ils ont prise pour une mèche de cheveux.
Au Xe siècle, l'empereur de Constantinople achète le Suaire au Calife. Le Suaire quitte la terre devenue musulmane pour rejoindre l'empire byzantin. Il arrive à Constantinople le 15 août 944. Il est alors conservé dans la chapelle Sainte-Marie-du-phare à Constantinople. C'est alors que l'on s’aperçoit que l'image du visage n’est pas isolée. Le tissu a été plié quatre fois en deux. C'est en fait un long tissu qui a recouvert la face dorsale de l'homme crucifié, puis sa tête pour venir reposer sur la face ventrale du cadavre. C'est donc un linceul complet et non uniquement un linge où un visage se trouverait étrangement inscrit.
À partir de ce moment, certaines icônes du Christ le montrent boiteux, avec la jambe gauche plus courte que la droite. Sur le Suaire, la jambe gauche du crucifié semble effectivement plus courte que sa jambe droite*. Cela provient de la technique de crucifixion : le pied gauche était tourné vers l’intérieur et positionné sur le droit avant qu'un clou unique les transperce. Une fois la rigidité du cadavre acquise, la jambe gauche garde une torsion qui semble la raccourcir.
Entre les XIIe et XIIIe siècles, plusieurs visiteurs extérieurs à l'empire byzantin témoignent avoir vu le Suaire. En 1147, Louis VII, le roi de France, écrit avoir vu à Constantinople le « drap où fut enveloppé Jésus »*. En 1171, Amaury de Lusignan (1145, 1205) seigneur poitevin parti en Terre sainte, témoigne lui-aussi l'avoir vu*. En 1190, le Suaire est dessiné par des seigneurs hongrois en visite à Constantinople*. Leurs croquis se trouvent toujours à la Bibliothèque Nationale de Budapest. Ils représentent tous les détails visibles à l’œil nu sur le Suaire. Les mains de l'homme crucifié sont croisées sur son ventre et seuls quatre doigts sont visibles. Les pouces sont repliés et invisibles comme cela survient quand les clous du crucifiement perforent les os du poignet.
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Codex Pray conservé à Budapest( 1192-1195). En 1203, le chevalier de Clari témoigna lui aussi l'avoir vu*. C'était un an avant le sac de Constantinople, en 1204, par la IVe croisade dirigée par Othon de la Roche. En 1357, on retrouve le Suaire en Champagne, en France, chez l'arrière petite fille d'Othon de la Roche, nommée Jeanne de Vergy, épouse de Geoffroy de Charny*.
Depuis, le Suaire est suivi sans interruption. En 1453, le Suaire est cédé à la famille de Savoie. Le 4 décembre 1532, il échappe de peu à la destruction par le feu. Le coffre en plomb dans lequel il est conservé dans la Sainte chapelle de Chambéry fond partiellement, laissant la brûlure d'une goutte de plomb qui traverse toutes les couches du Suaire plié. Il est alors restauré par quatre clarisses qui reprisent les traces de brûlure avec du coton.
La famille de Savoie le transporte à Turin. En 1868, la princesse Clotilde de Savoie effectue à nouveau quelques petites reprises sur le Suaire.
À son tour, la famille de Savoie le cède au Vatican en 1983.
Le 11 avril 1997, un incendie ravage la cathédrale de Turin. Le Suaire aurait pu disparaître sans le courage d'un pompier, Mario Trematore, qui parvient, à coups de hache, à ouvrir la protection en verre blindé de la châsse sacrée prévue pour résister à un lance-roquette.
* : Jésus, Jean-Christian Petitfils, p. 569, Fayard, 2011.