L'idée reçue
Le mariage des prêtres a toujours été interdit
Suivant l'exemple de Jésus et de ses disciples, les premiers chrétiens restent célibataires.
L'Eglise impose très tôt cette règle de vie : FAUX
L'obligation du célibat des prêtres ne remonte qu'au XIe siècle. Dans la tradition de l'Eglise catholique latine, l'ordination d'hommes mariés a donc été plus longtemps tolérée qu'interdite. Jésus n'a jamais formulé une telle interdiction, certains apôtres étaient mariés et le judaïsme, dont est issu le christianisme, n'impose pas le célibat aux rabbins.
Pourtant dès ses premiers siècles, l'Eglise catholique accorde une place importante à l'ascèse. Une tentative pour faire reconnaître le célibat des prêtres échoue au concile de Nicée en 325, qui institue cependant l'interdiction du mariage après l'ordination. Il semble que cette clause ne fut pas scrupuleusement respectée et les prêtres des premiers temps étaient donc pour nombre d'entre eux mariés.
Au IVe siècle, de grands évêques tels que Grégoire de Naziance ou Grégoire de Nysse avaient une femme et trente-neuf papes eurent épouse et enfants, quelques uns succédant même à leur père.
Avec l'essor du monachisme, la règle du célibat tend à s'imposer à l'ensemble du clergé. D'autant plus que les moines sont de plus en plus souvent choisis pour occuper les premières places de la hiérarchie ecclésiastique. Dès 385, le pape Siricius prend un décret allant dans le sens de l'interdiction de l'ordination des hommes mariés. La multiplication des décisions papales, des conciles et des synodes d'évêques réitérant l'injonction du célibat sacerdotal montre la difficulté pour l'Eglise de l'imposer. Celle-ci traverse une période de troubles graves avec la chute de l'Empire carolingien au Xe siècle. Le clergé est le premier concerné. les maux sont profonds : féodalisation (qui éloigne ques questions spirituelles), simonie (vente des biens sacrés et des bénéfices ecclésiastiques) et nicolaïsme (incontinence des prêtres qui se marient ou vivent en concubinage) sont dénoncés.
Une réforme est nécessaire. Initiée par Léon IX, c'est le pape Grégoire VII qui donnera son nom à la "réforme grégorienne". Il poursuit et précise, entre autres, sa critique de l'incontinence des clercs. Il veut un clergé entièrement voué à sa tâche, sans liens familiaux qui permettraient la fondation de castes qui pourraient détourner les biens de l'Eglise. Au concile du Carême de 1074, le pape fait interdire l'accès aux églises pour les prêtres mariés ou vivant en concubinage.
Que ce soit en Allemagne, en France, en Angleterre ou en Espagne, ces décisions sont mal acceptées par les clergés locaux et le concubinage des prêtres persiste. Parallèlement, la population adhère de plus en plus aux décisions papales et rejette ceux qui continuent d'avoir une maîtresse ou ont des moeurs dissolues. Les canons des conciles de Latran II en 1139, Latran III en 1179 et Latran IV en 1215, réitèreront l'interdiction de l'ordination des hommes mariés et du concubinage des prêtres. Cette interdiction sera minutieusement appliquée jusqu'à aujourd'hui dans l'Eglise catholique latine, à l'inverse des chrétientés d'Orient catholique et orthodoxe qui continuent d'ordonner des hommes mariés.
Olivier Tosseri
L'Histoire, mars 2010
Le mariage des prêtres a toujours été interdit
Suivant l'exemple de Jésus et de ses disciples, les premiers chrétiens restent célibataires.
L'Eglise impose très tôt cette règle de vie : FAUX
L'obligation du célibat des prêtres ne remonte qu'au XIe siècle. Dans la tradition de l'Eglise catholique latine, l'ordination d'hommes mariés a donc été plus longtemps tolérée qu'interdite. Jésus n'a jamais formulé une telle interdiction, certains apôtres étaient mariés et le judaïsme, dont est issu le christianisme, n'impose pas le célibat aux rabbins.
Pourtant dès ses premiers siècles, l'Eglise catholique accorde une place importante à l'ascèse. Une tentative pour faire reconnaître le célibat des prêtres échoue au concile de Nicée en 325, qui institue cependant l'interdiction du mariage après l'ordination. Il semble que cette clause ne fut pas scrupuleusement respectée et les prêtres des premiers temps étaient donc pour nombre d'entre eux mariés.
Au IVe siècle, de grands évêques tels que Grégoire de Naziance ou Grégoire de Nysse avaient une femme et trente-neuf papes eurent épouse et enfants, quelques uns succédant même à leur père.
Avec l'essor du monachisme, la règle du célibat tend à s'imposer à l'ensemble du clergé. D'autant plus que les moines sont de plus en plus souvent choisis pour occuper les premières places de la hiérarchie ecclésiastique. Dès 385, le pape Siricius prend un décret allant dans le sens de l'interdiction de l'ordination des hommes mariés. La multiplication des décisions papales, des conciles et des synodes d'évêques réitérant l'injonction du célibat sacerdotal montre la difficulté pour l'Eglise de l'imposer. Celle-ci traverse une période de troubles graves avec la chute de l'Empire carolingien au Xe siècle. Le clergé est le premier concerné. les maux sont profonds : féodalisation (qui éloigne ques questions spirituelles), simonie (vente des biens sacrés et des bénéfices ecclésiastiques) et nicolaïsme (incontinence des prêtres qui se marient ou vivent en concubinage) sont dénoncés.
Une réforme est nécessaire. Initiée par Léon IX, c'est le pape Grégoire VII qui donnera son nom à la "réforme grégorienne". Il poursuit et précise, entre autres, sa critique de l'incontinence des clercs. Il veut un clergé entièrement voué à sa tâche, sans liens familiaux qui permettraient la fondation de castes qui pourraient détourner les biens de l'Eglise. Au concile du Carême de 1074, le pape fait interdire l'accès aux églises pour les prêtres mariés ou vivant en concubinage.
Que ce soit en Allemagne, en France, en Angleterre ou en Espagne, ces décisions sont mal acceptées par les clergés locaux et le concubinage des prêtres persiste. Parallèlement, la population adhère de plus en plus aux décisions papales et rejette ceux qui continuent d'avoir une maîtresse ou ont des moeurs dissolues. Les canons des conciles de Latran II en 1139, Latran III en 1179 et Latran IV en 1215, réitèreront l'interdiction de l'ordination des hommes mariés et du concubinage des prêtres. Cette interdiction sera minutieusement appliquée jusqu'à aujourd'hui dans l'Eglise catholique latine, à l'inverse des chrétientés d'Orient catholique et orthodoxe qui continuent d'ordonner des hommes mariés.
Olivier Tosseri
L'Histoire, mars 2010