Le christianisme a-t-il miné l'Empire romain ?
Dès l'Antiquité, le christianisme a été rendu responsable de l'affaiblissement du pouvoir central. C'est paradoxal, car des empereurs chrétiens furent de remarquables généraux et de grands hommes d'Etat. Mais le culte polytthéiste officiel avait pour but essentiel d'assurer la stabilité et la prospérité de l'Etat : les sacrifices gagnaient à Rome la faveur des dieux, les serments prêtés devant les autels l'assuraient de la fidélité des sujets, les empereurs étaient promis à la divinisation. Dès lors que l'empereur abandonnait ces pratiques, prospérité et stabilité se trouvaient menacées.
Cela, c'était le point de vue des tenants de la religion traditionnelle. Ce qui est sûr, c'est que le christianisme n'a pas tué l'empire en minant sa force militaire. Il est au contraire arrivé au pouvoir grâce à son efficacité dans ce domaine : "Sous ce signe (la croix) tu vraincras", c'est ce que Constantin avait lu dans le ciel avant la bataille décisive dite du pont Milvius, qu'il remporta contre l'empereur d'Occident Maxence et qui lui livre Rome (312).
Mais le christianisme ne se borna pas à se rôle. Il revêtit aussi les habits, neufs pour lui, d'une religion institutionnelle. Dans les provinces, la stabilité en poste des évêques élus, à la différence des gouverneurs nommés, leur assura compétence et autorité, et leur permit de jouer les interfaces entre le pouvoir central et les fidèles. L'Eglise a représenté ainsi un merveilleux instrument administratif, qui restera au service du pouvoir en Orient jusqu'en 1453 et au-delà. Et se révélera capable en Occident, le moment venu, de suppléer la carence de ce pouvoir.
Pierre Chuvin
Né en 1943, Pierre Chuvin a fait des études de lettres classiques (agrégation), en particulier de grec, mais il a aussi étudié à l'Inalco. Il est professeur émérite de langue et littérature grecques antiques à l'université de Paris-X Nanterre. De 1993 à 1998, il a été le premier directeur de l'Institut français d'études sur l'Asie centrale à Tachkent, puis, de 2003 à 2008, le directeur de l'Institut français d'études anatoliennes (IFEA) à Istanbul.
Juillet 2010
Dès l'Antiquité, le christianisme a été rendu responsable de l'affaiblissement du pouvoir central. C'est paradoxal, car des empereurs chrétiens furent de remarquables généraux et de grands hommes d'Etat. Mais le culte polytthéiste officiel avait pour but essentiel d'assurer la stabilité et la prospérité de l'Etat : les sacrifices gagnaient à Rome la faveur des dieux, les serments prêtés devant les autels l'assuraient de la fidélité des sujets, les empereurs étaient promis à la divinisation. Dès lors que l'empereur abandonnait ces pratiques, prospérité et stabilité se trouvaient menacées.
Cela, c'était le point de vue des tenants de la religion traditionnelle. Ce qui est sûr, c'est que le christianisme n'a pas tué l'empire en minant sa force militaire. Il est au contraire arrivé au pouvoir grâce à son efficacité dans ce domaine : "Sous ce signe (la croix) tu vraincras", c'est ce que Constantin avait lu dans le ciel avant la bataille décisive dite du pont Milvius, qu'il remporta contre l'empereur d'Occident Maxence et qui lui livre Rome (312).
Mais le christianisme ne se borna pas à se rôle. Il revêtit aussi les habits, neufs pour lui, d'une religion institutionnelle. Dans les provinces, la stabilité en poste des évêques élus, à la différence des gouverneurs nommés, leur assura compétence et autorité, et leur permit de jouer les interfaces entre le pouvoir central et les fidèles. L'Eglise a représenté ainsi un merveilleux instrument administratif, qui restera au service du pouvoir en Orient jusqu'en 1453 et au-delà. Et se révélera capable en Occident, le moment venu, de suppléer la carence de ce pouvoir.
Pierre Chuvin
Né en 1943, Pierre Chuvin a fait des études de lettres classiques (agrégation), en particulier de grec, mais il a aussi étudié à l'Inalco. Il est professeur émérite de langue et littérature grecques antiques à l'université de Paris-X Nanterre. De 1993 à 1998, il a été le premier directeur de l'Institut français d'études sur l'Asie centrale à Tachkent, puis, de 2003 à 2008, le directeur de l'Institut français d'études anatoliennes (IFEA) à Istanbul.
Juillet 2010